Depuis la création du village, Nozay, pendant des siècles, garda une population remarquablement stable. Les renseignements fournis par les archives donnent les chiffres suivants :

  • En 1190 - 224 habitants ;
  • En 1793 - 260 habitants ;

La situation géographique isolait la commune peuplée presque exclusivement de cultivateurs, d'ouvriers agricoles permanents ou saisonniers, de bûcherons, de carriers et de quelques artisans. Jusqu'à la Révolution, les événements politiques nationaux n'atteignirent pas cette population laborieuse, sage et pacifique, qui vivait au rythme des travaux des champs, des récoltes, des sonneries des cloches de son église marquant les heures de la journée et des offices religieux suivis avec beaucoup d'assiduité. Cependant, les grands drames de la France n'épargnèrent pas Nozay.
 
Pendant la guerre de Cent ans (1337-1453), le roi d'Angleterre Edouard 111 s'empara de la région de Montlhéry le 31 mars 1360. Elle fut ensuite prise et reprise pendant la lutte des Armagnacs et des Bourguignons. La misère était immense. Les champs n'étaient plus cultivés, la population vivait dans la peur permanente. Des bandes de soldats indisciplinés parcouraient la campagne, pillant, égorgeant, brûlant les fermes. A ces malheurs, il faut ajouter la famine et les épidémies de peste. La plus terrible fut celle de 1353 qui décima le tiers des habitants. Les Anglais n'évacuèrent le pays qu'en 1439. Les temps de la misère n'étaient pas terminés et la paix fut de courte durée. La guerre dite du Bien Public opposa le roi de France Louis XI à son vassal rebelle Charles le Téméraire, duc de Bourgogne. Une farouche bataille se déroula à une lieue de Nozay, dans la plaine de Longpont, au pied de la tour de Montlhéry, le 16 juillet 1465. Les chroniqueurs de l'époque rapportent que 3.600 hommes y périrent et que de nombreux blessés furent soignés à Nozay. Le pays était épuisé.

Le roi, pour lui redonner vie, fit venir de province plusieurs familles qui s'y installèrent et firent souche. Rudes années où l'on vivait dans la hantise permanente de la faim et de la guerre. L'époque était dominée par l'église qui réglait tous les actes de la vie. La foi religieuse apportait à chacun avec l'apaisement de l'âme l'acceptation passive de la mort et du malheur. Cependant, et malgré ces années tragiques, on savait aussi rire, chanter et s'amuser. Les fêtes étaient nombreuses et variées : moissons, vendanges, saints locaux, pèlerinages à Longpont, Saint-Sulpice de Favière, Saint Denis, etc.

Mais le XVIe siècle vit revenir les temps difficiles avec les guerres de religion qui ensanglantèrent la France et ravagèrent à nouveau notre région. Condé, chef des calvinistes, s'empara de Montlhéry. Ses soldats pillèrent la campagne, terrorisant les paysans. Le soir venu, on se barricadait chez soi, tandis que des guetteurs surveillaient la plaine pour donner l'alerte. Les champs restaient en friche. La misère était immense et la mortalité effrayante. La paix et une relative prospérité ne revinrent qu'avec le roi Henri IV qui fit son entrée à Montlhéry le 15 juillet 1596.

Ainsi passèrent ls années sans beaucoup de transformations locales. La vie de chacun et de chacune était faite du travail opiniâtre de la terre. Celle-ci était fertile, certes, mais lourde, difficile à travailler en raison de sa forte proportion d'argile, imperméable, elle ne permettait pas l'accès aux champs après les pluies abondantes d'automne et d'hiver. On labourait péniblement avec l'araire tractée par des bœufs ou des chevaux. Tous les travaux de récoltes se faisaient manuellement. Il est vrai que la main-d'œuvre était nombreuse. On cultivait le blé, le seigle, l'avoine, la fève, et on entretenait des prairies pour l'alimentation du bétail. La vigne occupait une place importante. On élevait aussi des moutons et quelques chèvres. Chaque famille avait son poulailler et son clapier. Elle engraissait aussi un ou plusieurs porcs pour sa consommation personnelle et faisait son vin dont elle vendait une partie de la récolte.
Mais il y avait les mauvaises années. Quand l'hiver était trop rude, ce qui arrivait plus souvent qu'aujourd'hui, les blés gelaient. C'était alors la vraie misère quand on avait payé la dîme au seigneur, la taille au roi et les autres nombreuses charges. On vivait dans la crainte de la famine, de la guerre, de la peste avec toujours l'angoisse du lendemain. Le pain était la base de la nourriture. On le cuisait dans le four banal une fois par semaine. Il s'agissait de lourdes miches qui pouvaient se conserver facilement pendant plusieurs jours. Quand elles étaient trop sèches, on les utilisait encore, trempées en tranches fines, dans la soupe. Les dernières miettes étaient mangées, car on avait pour le pain le plus grand respect. On ne connaissait pas encore la culture des pommes de terre. La soupe était faite de légumes, de fèves, avec un morceau de lard. Sauf la volaille, la viande était rare et un véritable luxe. Le travail quotidien était réglé par la longueur du jour. On se levait et on se couchait avec le soleil qui réglait les heures de la journée. Pendant la belle saison la journée de travail était interminable. On moissonnait avec la simple faucille. Le blé était battu au fléau. Puis venaient le temps des vendanges et, dans les brumes froides, celui des labours et des semailles. Mis à part les jours de fête, il n'y avait aucun loisir. On sortait peu et même pas du tout, sauf pour aller au marché du lundi à Montlhéry.

Ainsi a-t-on vécu jusqu'à la Révolution de 1789, laquelle va considérablement transformer la situation sociale. Les archives permettent de connaître les familles de cultivateurs à cette époque. Peut-être certains d'entre vous y retrouveront-ils leurs ancêtres :

 Veuve BILLARD                                        Germain MARTIN
 Jacques COSSONNET père                     Veuve Vincent MARTIN
 Jacques COSSONNET fils                        Louis MICHAUD
 Jean-Baptiste DAUPHIN                         Claude-Nicolas MICHEL
 Denis DONNE                                          Germain PAUPE
 Jean-Nicolas FINET                                  Jean PAUPE
 FLEURY                                                     Jean-Claude PAUPE
 Louis GOUGET                                        Louis REDON
 Jacques LEGOURD                                  Louis RIVET
 Germain LEROY                                     Denis ROINVILLE
 Jacques LEROY                                       Pierre ROUSSEAU
 Denise LIBEROLLE                                 Julien ROUSSEAU
 Pierre LIBEROLLE                                  Jean TASSIN
 Jean-Claude MARTIN 

La tourmente révolutionnaire déferla sur la France. En avril 1789, des émeutes éclatèrent dans la région suite à un hiver désastreux qui avait gelé les blés et à la menace de disette qui allait en résulter. Les paysans se rassemblèrent sur la place du Marché de Montlhéry. Il y eut des heurts violents avec la maréchaussée royale. Nul doute que les cultivateurs de Nozay participèrent à ces actions en avril 1789.

Les grandes journées révolutionnaires et les réformes profondes de l'Assemblée constituante, de la Législative et de la Convention eurent pour Nozay des conséquences importantes dont on retrouve les traces dans les registres municipaux : 

  • Février 1790 nomination du premier maire, Jean-Nicolas Finet, et formation d'une garde nationale locale ;
  • 21 juin 1791 suite à la fuite du roi, des ordres sont donnés pour arrêter toutes les personnes étrangères à la commune ;
  • vente des biens nationaux qui permit aux paysans de devenir propriétaires en achetant les terres prises à la noblesse et au clergé ;
  • suppression des droits féodaux ;
  • registres de l'état civil tenus par la mairie.

Quand l'apaisement viendra avec le Directoire, le Consulat et le Premier Empire, bien des choses avaient changé dans la vie locale.

Les guerres de la Révolution et de Napoléon ne touchèrent pas la commune, protégée par son isolement et à l'abri des bouleversements politiques. La vie des habitants devint plus facile. On se mit à cultiver la pomme de terre, ce qui supprima les risques de famine. Lentement, la population augmentait.